jeudi 15 décembre 2011

De l’Histoire du Front national aux histoires du FN


Très intéressante émission de France 3, mercredi 30 novembre, à 20h35 (vous la retrouverez sur internet). Son titre : « Le diable de la République ». Elle raconte de façon fort objective l’histoire du Front national. Beaucoup croient, y compris au FN, que c’est Jean-Marie Le Pen qui a fondé son mouvement. Rien de plus faux. Ce sont les dirigeants d’Ordre Nouveau, dont son chef charismatique Alain Robert (qui finira mal : conseiller général du RPR), François Brigneau et Roland Gaucher qui eurent l’idée de créer un Front national qui permettrait de fédérer les énergies nationalistes et d’élargir le socle d’Ordre Nouveau, qui restait une organisation regroupant essentiellement des jeunes. Mais il fallait trouver une “potiche” présentable qui acceptât d’en assurer la présidence. Et on alla chercher Le Pen qui ne représentait plus rien, politiquement, mais qui avait une certaine notoriété, liée au poujadisme et à la campagne présidentielle de Tixier-Vignancour. La composante des amis de Le Pen ne pesait pas lourd au FN, alors qu’Ordre Nouveau dominait totalement la nouvelle organisation. Catastrophe : suite à un gigantesque meeting d’Ordre Nouveau, le 21 juin 1973, à la Mutualité, destiné à montrer la force de cette composante au sein du FN, de violents affrontements eurent lieu avec la Ligue communiste dirigée par Alain Krivine, entraînant la dissolution des deux organisations. Le Pen en profita pour prendre la main, entraînant le départ de la plupart des fidèles d’O.N., dont votre serviteur, qui créèrent le Parti des Forces Nouvelles (PFN), qui fut durant près de 10 ans le rival (bien plus dynamique) du FN.

     L’HISTOIRE DU FRONT NATIONAL
    On connaît la suite de l’aventure. On pourra voir des interviews de François Brigneau, Carl Lang, Bruno Mégret, Pierre Vial et bien d’autres. Relevons cette perle, signée Michel Rocard : « Hitler fut un élu du suffrage universel. » Des propos similaires valurent à Le Pen d’être traîné devant les tribunaux et condamné.
Le Pen déclare : « Depuis de nombreuses années, je vois qu’on nous a affublés de la tunique du diable. » Roger Holeindre lui réplique : « Je ne veux pas être dédiabolisé. » On reverra avec grand intérêt un extrait du discours de Le Pen sur la dalle d’Argenteuil, où il déclarait, s’adressant aux “Jeunes” : « Si certains veulent vous karchériser pour vous exclure, nous voulons, nous, vous exclure de ces ghettos de banlieue, où les politiciens vous ont parqués pour vous traiter de racaille par la suite. » Cris de quelques “Jeunes” présents : “Cochon !” Commentaire des plus pertinents du journaliste présentant l’émission : « Déboussolés par la stratégie de Nicolas Sarkozy et par les divagations de Le Pen, qui s’égare dans la conquête du vote arabe des cités, que Sarkozy voulait karchériser, les électeurs votent Sarkozy. Le Pen est battu sur son propre terrain… » Relevons ce propos de Roger Holeindre : « Je pense que Jean-Marie Le Pen a favorisé sa fille parce qu’elle s’appelle Le Pen, c’est tout » ; et puis Carl Lang : « Dans sa psychologie, le FN, c’est lui. On n’est plus dans le domaine du Front national, on est dans le domaine du Front familial ». Et puis, pour la bonne bouche, cette phrase d’une grande profondeur et d’un immense courage de Marine Le Pen prononcée dans son discours du 1er mai 2011 lors de la fête de Jeanne d’Arc : « Que nous soyons homosexuels, hétérosexuels, musulmans, chrétiens, athées, juifs, musulmans, noirs, blancs, nous sommes tous français. » Amen.
    
    FN : LES DÉRIVES CONTINUENT
    L’avocat franc-maçon Gilbert Collard, ancien conseiller du MRAP, est le président du comité de soutien de Marine Le Pen à l’élection présidentielle. Lisez ses propos, tenus il y a quelques jours sur France 2. Il déclare que l’on pouvait rejoindre Marine Le Pen « sans épouser les idées du Front national ». « J’ai pour rôle d’amener le maximum d’hommes et de femmes à Marine, pas forcément au Front, parce qu’on peut rejoindre Marine Le Pen sans pour autant épouser les idées du Front national. » Il prend pour exemple la peine de mort : « Je suis contre, je suis tout à fait opposé […], donc je me sens plus à l’aise au comité qu’au parti. » Selon Gilbert Collard, « il n’y a pas d’incompatibilité entre le fait de rejoindre Marine et le fait de défendre les Droits de l’Homme. » Et Jean-Marie Le Pen, dans tout ce salmigondis ? « Il est comme mon père, Jean-Marie Le Pen […] parfois on se querelle avec beaucoup de respect, parce que je vois en lui l’image d’un père avec lequel je ne me suis jamais entendu. » Et ses petites phrases ? « Je l’ai toujours dit, je ne suis jamais arrivé à comprendre… Ce petites phrases, moi je les condamne », a-til conclu. Si vous voulez mieux faire connaissance avec Gilbert Collard, rendez-vous sur son site <gilbertcollardleblog.com>. Dans la rubrique « les liens », pas de renvoi vers le site de Marine Le Pen, mais un renvoi vers le parti radical de Jean-Louis Borloo… A votre avis, ce cirque va-til encore durer longtemps avant que Jean-Marie Le Pen ne commence à s’énerver ?

     MARINE LE PEN A DU SOUCI À SE FAIRE
    Malgré sa médiatisation, le fait est, relevé par tous les observateurs, que sa campagne ne décolle pas. Son discours et la présentation de son programme, lors de la récente convention organisée par Marine Le Pen, où son père brillait par son absence, ont semé la consternation chez un grand nombre de participants. C’était, à les écouter, “nul”. La recherche de signatures se révèle plus que difficile. La faute, bien sûr, au fait que les maires qui signeront verront leurs noms étalés sur la place publique. La faute aussi à l’affaiblissement considérable du mouvement, suite au départ de nombre de ses meilleurs cadres et à une démobilisation générale, le Front n’étant plus un parti de militants prêts à mouiller leur chemise pour leur idéal. La faute enfin aux purges successives qui ont fini par fortement réduire le potentiel de signatures et de relais locaux (que l’on songe à Pierre Jaboulet-Vercherre en Bourgogne et à Fernand Le Rachinel en Normandie qui ramenaient à chaque présidentielle plusieurs dizaines de précieux paraphes du fait de leur notoriété, de leur popularité et de leur implantation). Sans véritables relais locaux talentueux, comment faire ? C’est l’énergie et le talent d’organisateur de Carl Lang qui avaient sauvé Le Pen lors des précédentes présidentielles. Carl Lang est parti et sera le candidat de l’Union de la Droite Nationale. Plus rien à espérer non plus de l’UMP qui avait apporté un nombre non négligeable de signatures, notamment corses, à Le Pen. Cette fois-ci, Sarkozy n’a a priori aucun intérêt à une candidature de MLP. Son absence apporterait à Sarkozy, au premier tour, de précieux pourcentages qui lui permettraient de creuser le fossé avec le résultat de François Hollande, créant ainsi la possibilité d’une dynamique victorieuse au second tour. Sarkozy sait que les sondages concernant Marine Le Pen, en baisse au demeurant, sont probablement surévalués. La faute, non pas vraiment à des manipulations volontaires, mais aux fameux “redressements” qu’effectuent les instituts de sondage par rapport aux données brutes. Les électeurs du FN, comme ceux du PC, “mentent” en effet aux sondeurs et ne livrent pas tous leurs intentions de vote. Les sondeurs le savent évidemment et “redressent” les résultats bruts en fonction d’élections précédentes. JMLP ayant été bien plus diabolisé que sa fille, il est fort à parier que les redressements effectués en fonction des élections précédentes surévaluent le résultat de Marine Le Pen. Par ailleurs, il n’est pas exclu que des remous sérieux se produisent dans les prochaines semaines au sein du FN et de l’équipe de MLP. Plusieurs cadres de la campagne présidentielle, dont Paul-Marie Coûteaux, qui avait été présenté comme une prise de choix, viennent déjà de se retirer du dispositif. D’autres vont suivre. La remontée de Nicolas Sarkozy, que l’on donnait pour mort il y a deux mois, risque d’être redoutable pour Marine Le Pen. Dès lors que celui-ci apparaîtra comme pouvant l’emporter sur François Hollande, le cauchemar du vote utile se profilera. Le vote utile est un tsunami contre lequel ni le talent, ni la détermination, ni l’argent ne peuvent rien. La probabilité est donc grande aujourd’hui que le résultat de Marine Le Pen, au premier tour de l’élection présidentielle, soit inférieur ou égal à 15 %, ce qui apparaîtrait comme une défaite majeure, avec les conséquences que l’on imagine au sein du Front national. Nous aurons droit à un remake du film Règlements de comptes à Ok Corral, avec une différence cependant : les acteurs seront tous français et le tournage sera réalisé à Nanterre, au siège du FN, avec probablement quelques prises de vue à Montretout, au domicile de JMLP.…
   Robert Spieler

tiré de  – Rivarol n°3025 du 9 décembre 2011    via "la flamme" lien ici

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