Frédéric Malaval, auteur du livre Ecoracialisme,
non encore paru en édition, nous propose en exclusivité sur un mode
toujours original son quatrième extrait. Sa grande interrogation cette
fois, c’est : les races existent bien, mais que dire de l’origine des
peuples ? L’auteur, tout en aiguisant l’intérêt du lecteur, le conduit
au gré de ses réflexions philosophiques sur quelques pistes dont on ne
devine pas l’issue.
Polémia
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L’insondabilité de l’origine des peuples
Aujourd'hui, la théorie raciale revient
en force. Oui, les races existent. Ce sont des catégories biologiques
pertinentes. Mais la formalisation de catégories pose problème. Ainsi,
en retenant un des critères les plus évidents qui est la couleur de la
peau, il est possible de créer au moins deux catégories : les blancs et
les noirs. Cela devient plus difficile dès que l'on envisage toutes les
populations et individus observables des latitudes équatoriales aux
latitudes septentrionales. Il y a alors un continuum expliqué par le
degré moyen d'exposition au soleil. Il en est apparemment ainsi de
chaque caractéristique étudiée participant à la catégorisation. Or, la
difficulté n'est peut-être pas biologique mais purement philosophique.
C'est celle qui oblige tout un chacun à créer partout des catégories au
nom de ce fameux principe de non-contradiction inscrit dans le marbre de
la pensée moderne, et donc de la science moderne. Or, la question
raciale confronte en permanence ses protagonistes à des constats les
obligeant à recourir à ce principe de non-contradiction pour discréditer
ou fragiliser la notion de race. Ainsi, si un gène particulier paraît
singulariser une population donnée, il est exclu que celui-ci se trouve
dans d'autres populations ou soit absent de la population de référence.
Répondre à la question de l'origine d'un peuple est donc quasiment
impossible, malgré l'apport de toutes les disciplines abordant ce thème :
l'histoire, la paléontologie, la génétique, l'historiographie, la
linguistique, l'anatomie, l'anthropologie, etc.
Plusieurs exemples permettent de s'en convaincre
Traditionnellement, il est avancé que
l'Angleterre s'est constituée à partir d'éléments celtes, anglo-saxons,
scandinaves et franco-normands. L'apport migratoire allogène
contemporain est encore rarement évoqué. Une approche génétique récente
suggérerait, elle, que 75 à 95% de la population anglaise descendraient
de populations préhistoriques venues de la Péninsule ibérique. Pourtant,
un scénario majoritaire jusqu'à la fin des années 1980 envisageait un
remplacement complet de la population d'origine celte par une invasion
massive de peuples germaniques. Pour d'autres, seules les classes
dirigeantes auraient été affectées par les invasions anglo-saxonnes.
Etc.
Pour la France, c'est aussi compliqué,
mais quand même moins que pour qualifier les Juifs et les juifs. Là,
c'est le flou le plus total, les protagonistes au débat produisant le
pour et son contraire. Religion, race, peuple, nationalité, divinités,
etc., tout a été envisagé. En Union soviétique, par exemple, ils avaient
obtenu une reconnaissance comme nation. Pas considérés comme russes car
venant majoritairement de la Rescpospolita (Pologne-Lituanie)
démantelée, et avant d'Europe de l'Ouest, ils avaient obtenu un statut
national, associé à un territoire : le Birobidjan, oblast autonome juif à
l'est de l'URSS. Ils auraient préféré la Crimée, mais Staline ne
voulait pas. Ainsi, à la thèse dominante d'un peuple juif directement
issu de la Palestine, dispersé il y a deux mille ans dans l'Empire
romain, est opposée l'idée que ceci est une mythologie. Les Juifs et les
juifs sont issus de peuples et d’individus judaïsés dans le passé et
donc ne forment pas une lignée au sens évolutionniste. Le gène juif
n'existerait pas. A suivre, donc.
Enfin, terminons cette évocation par une
question qui a mobilisé les savants depuis des lustres : l'origine des
Berbères et berbères. L'objectivité devrait être plus facile car les
enjeux politiques les concernant sont faibles. Il n’en est rien. Pour
les spécialistes, les groupes berbères sont isolés, coupés les uns des
autres et tendent à évoluer d’une manière divergente. Leur dimension et
leur importance sont très variables. Il n'y aurait pas de langue
berbère, ni de peuple berbère et encore moins une race berbère. Tous les
spécialistes sont d’accord… et cependant les Berbères existent. (…) Des
Kabyles, plus précisément. Fiers du cloisonnement de leur société,
ceux-ci font de saint Augustin, un des fondateurs du christianisme, un
des leurs. Ils vantent l'endogamie comme le moyen leur ayant permis de
résister aux envahisseurs successifs ayant colonisé leurs territoires :
Phéniciens, Grecs, Romains, Vandales, Arabes, Turcs, Européens, … Mais
sur la question de leur origine, point de certitudes. Dès la plus haute
Antiquité, des récits circulaient sur leurs origines dans les milieux
savants et chez les mythographes. Les historiens du Moyen Age, par de
nombreux traits, conservèrent ce mode de pensée antique. lbn Khaldoun,
un des plus connus, a écrit une Histoire des Berbères. Il donne
une origine orientale aux différentes fractions. El Bekri les fait
chasser de Syrie-Palestine par les Juifs après la mort de Goliath. Pour
d'autres, les Berbères seraient les descendants de la tribu de ce
Goliath. Les auteurs modernes européens se sont montrés autant, sinon
plus, imaginatifs que leurs prédécesseurs antiques ou médiévaux. La
présence indiscutable d’individus blonds aux yeux clairs dans plusieurs
régions montagneuses proches du littoral et actuellement berbérophones
accrédita longtemps la légende d’une origine nordique de ces peuples :
Européens constructeurs de mégalithes pour les uns, Gaulois mercenaires
de Carthage pour les autres. Alfred Rosenberg, un des auteurs très
populaires dans l'entre-deux-guerres en Allemagne, était convaincu de
cette hypothèse nordique. Par commodité, on les intègre au monde arabe.
Seule certitude : ils sont installés dans le nord de l’Afrique depuis
des millénaires.
Face à ces apories, nier l’existence des
races fut une solution facile pour éluder la question des catégories
raciales. Créer des ensembles unanimement acceptés est illusoire.
Pourtant, les USA reconnaissent tout à fait officiellement le terme de «
race » pour définir ethniquement leur population. Il appartient
toutefois à chacun de définir lui-même à quelle « race » il se sent
appartenir. Issu d'une mère européenne et d'un père africain, Barack
Obama, le président élu en 2008, se définit lui-même comme «
afro-américain ». Ainsi, aux Etats-Unis se pose à chaque recensement la
question des catégories raciales. Les Arabes s'offusquent de ne pas
trouver une case les concernant dans les questionnaires. Les Latinos,
eux, sont amenés à se demander ce qu’ils sont : une origine, une race,
une sous-catégorie ? Dans le recensement 2010, les Latinos ne sont pas
considérés comme une race. La question 9, qui demande de quelle race
sont les habitants du foyer, propose pas moins de 14 choix différents
(blanc, noir, indien d’Amérique, philippin, vietnamien, chinois,
japonais ou « autre asiatique »…) ; mais pas latino. Alors, 54% des
Américains d’origine « latinos » s’y définissent comme blancs, 1,5% se
voient noirs et 40% ne s’identifient à aucune race. Selon une autre
approche, il n'existerait que trois races aux Etats-Unis : les races «
caucasienne (le terme américain pour désigner les blancs), mongoloïde et
négroïde ». (…)
Bref, aborder la question sous cet angle
engendre des interrogations et des réponses infinies et
contradictoires. Elle entre dans la catégorie, elle, bien définie, de ce
que les mathématiciens appellent « les problèmes sans solution ».
Frédéric Malaval
24/01/2013
Ecoracialisme (4) L’insondabilité de l’origine des peuples
24/01/2013
Ecoracialisme (4) L’insondabilité de l’origine des peuples
A suivre Source
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