mardi 29 mars 2016

Hérédité, milieu et intelligence

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L'illusion égalitaire

 Dans les rayons standardisés du « prêt à penser » contempo­rain, l'une des idées qui, pour être fausses, sont pourtant le moins contestées, est celle de la prédominance absolue du milieu sur l'hérédité. L'homme, selon cette thèse, serait tout entier condi­tionné par son environnement. A l'arrière-plan, se trouve bien évidemment un à priori idéologique : l'égalité fondamentale entre les hommes ne serait altérée que par les mauvaises conditions de la vie sociale. La société seule est responsable, non les hommes. La doctrine n'est pas neuve. Sa première expression globale remonte à 1754 : c'est le fameux Discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi les hommes, de Jean-Jacques Rous­seau.
En deux siècles, l'argumentation des « environnementalistes » a peu changé : la formation de l'intelligence et de la personnalité doit tout au milieu; l'hérédité, si elle joue un rôle, ne peut être que dangereuse, puisqu'elle fausse le jeu de l'égalité. Certains iront même plus loin et soutiendront que l'environnement, le milieu, c’est-à-dire tout l'acquis de l'homme par opposition à ce qui est inné et transmis héréditairement, pouvaient être intégrés dans la lignée génétique et stockés dans la « mémoire de l'hérédité ».
C'était soutenir que les Chinois installés en Afrique devenaient aussitôt négroïdes et que les manchots n'engendraient plus que des enfants à un bras.
De cette inscription quasi instantanée du milieu dans le patrimoine génétique de l'espèce, on aperçoit aussitôt le parti politique qui pouvait en être tiré : l'environnement excellent créé par la mise en œuvre des doctrines marxistes modifiait nécessaire­ment l'homme par une transmission héréditaire des caractères acquis à travers ce milieu.
Bien que cette théorie n'ait jamais résisté ni à l'analyse ni à l'expérimentation, elle trouvera une grande audience en U.R.S.S. et la trouve encore en France même, pour des motifs politiques parmi certains enseignants.
Le lyssenkisme
Son plus grand défenseur sera Trofim D. Lyssenko (1898-1976), président de l'Académie fédérale Lénine des sciences agronomiques, directeur de l'Institut génétique de Moscou, et trois fois prix Staline. Lyssenko, dont Jaurès Medvedev disait qu'il faisait penser à un homme qui souffrait constamment des dents, que Julian Huxley traitait d'analphabète scientifique et Jacques Monod de « charlatan autodidacte et fanatique », soutenait jusqu'à l'extrême limite de l'inconséquence les principes de l'acquis intégré à l'hérédité. « L'hérédité, affirmait-il, est l'effet de la condensation des influences des conditions du milieu extérieur, assimilées par les organismes au cours d'une série de générations antérieures... Cette doctrine résout les grands problèmes théoriques en apportant une solution aux problèmes pratiques importants de l'agriculture socialiste... Elle fait désormais partie du trésor de nos connais­sances, du fonds d'or de la science... Elle transforme la nature vivante pour le bien du peuple soviétique. Gloire au grand ami et au grand coryphée de la science, notre guide et notre éducateur, le camarade Staline, etc. (1). »
Dans les rues de Moscou on chante :
« Joue gaiement mon accordéon
Que je chante avec mon amie 
La gloire éternelle de l'académicien Lyssenko. »   
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